Munster – Un premier Trail de 40 km, des amis en or et la découverte du travail encadré par un coach. Souvenirs d’un week-end parfait dans les Vosges lors de ma quatrième participation au Munster Trail.
Impossible de dissimuler mon stress quelques minutes avant le départ de ma première course de 40 km. Cathy, Pierre, Kevin et Johann, les amis de Run2trail, sont là pour me rassurer. Le ciel de Munster est complètement plombé et déverse une pluie intense. Les conditions de courses seront délicates. C’est aussi le plaisir du Trail. Le vent est bien présent et cela promet des passages délicats dans les sections qui empruntent les sommets. La veste de pluie est de rigueur !
Le départ est donné et le premier kilomètre est rapide à travers les rues du centre de Munster. La première montée arrive vite et je rentre alors de plein pied dans la stratégie établie: marcher directement dans toutes les montées avec l’aide des bâtons. Il doit y avoir une vingtaine de participants derrière moi, mais je ne vais pas y prêter attention.
Avec Kevin Gathot, mon coach, on a décidé que je devais gérer les deux premières sections de course de deux fois 10 kilomètres. Mais ces sections sont aussi celles qui présentent le plus de dénivelé, avec 10 km et 470 m de D+ à effectuer en 1h45 et 10 km et 830 m de D+ à boucler en 2h45 pour arriver au seul ravitaillement de l’Auberge du Tanet. L’effort est conséquent sous la pluie et le vent. Le cors chauffe. Je surveille aussi mon alimentation et mon hydratation, car il n’est pas question de me sous-alimenter et de rater une dose d’énergie. Je me force à manger et à respecter mes rations toutes les 45 minutes. Je bois aussi, pas assez, mais je gère la réserve d’eau. Ce Trail se dispute en semi-autonomie (un seul ravito sur 40 km), c’est un paramètre de plus à gérer.
Les montées se succèdent et demandent un certain effort. Les chemins sont redoutables. Parfois, ce sont des sentiers constitués uniquement de rochers, d’escaliers naturels en pierres ou en racines. Je suis dans l’adrénaline de la course, je vais sans doute un peu trop vite. A Soultzeren, j’atteins la « Fan zone » et j’adresse un premier message aux amis. J’ai 15 minutes d’avance sur la barrière horaire. Les dix kilomètres suivants sont gérés de la même manière. Je cours dans les descentes et sur le plat facile, je marche les montées à vive allure. Vers le 18e km, on aborde une montée très sèche sous un remonte pente de piste de ski. Elle tue ! Elle épuise, elle asphyxie. J’entends au loin derrière moi un groupe de 5-6 personnes. Ce sont les derniers de ma course, suivis par les serre-files.
Au ravitaillement du Tanet, il pleut et le vent glacial souffle. J’ai désormais 30 minutes d’avance sur la barrière horaire. Je prends le temps de remplir mes flasques. Je goute les Roïgabrageldi, une spécialité culinaire vosgienne faite de pommes de terre et d’oignons. Un demi pot suffit pour me donner une ration chaude, sans m’alourdir.
Certains concurrents abandonnent dans ces conditions très froides. Je me relance, je sais que peu de personnes sont derrière moi. Ces deux premières sections ont été tellement éprouvantes que je sens que je dois modifier ma stratégie. Kevin m’avait indiqué de me libérer sur la troisième section de 14 km et de 530 m de D+. Mais je dois me reposer. Je marche pour laisser passer un moment de fatigue intense. Je décide aussi de m’arrêter pour enfiler des gants et nettoyer les chaussures emplies de sable. Mes mains sont glacées. Ne pas enfiler les gants aurait été une terrible erreur. Un peu plus loin, je suis dépassé par les serre-files de la course de 100 km, à la poursuite du dernier coureur qui n’a pas abandonné. L’un d’eux m’entoure la hanche dans un geste d’encouragement et me souhaite bonne course. Sympa !
A l’approche de l’arrivée, j’aperçois mon coach et j’ai des difficultés à retenir mon émotion
Vers le 23e km, j’entend des voix derrière moi. Je constate que ce sont les serre-file de ma course. Je n’ai perdu aucune place. Mais les derniers participants plus lents que moi ont bien abandonné au Tanet.
Je me retrouve dernier. Les serre-files ont beau me rassurer, je n’aime pas cela. Je sens une sorte de pression. Cela me donne la rage. Dans les grosses montées suivantes, je mets plus de rythme et je rejoins un groupe. Je dépasse les gens. Mais sur le plat et dans les descentes, ils reprennent de l’avance. On joue ainsi au chat et à la souri, on se bat tous pour ne pas être dernier. J’oublie de m’alimenter. Vers le 32e km, c’est la déception: trois personnes abandonnent, alors qu’il ne reste que le plus facile à digérer. On reste donc à deux en queue de peloton à partir du sommet du Glasborn.
Je suis émoussé avant la dernière descente. Je n’ai pas envie d’être dernier. Je sais que la descente est pénible pour les articulations. Mais je décide de courir malgré la douleur. Les chocs sont vifs. Je suis dépassé par les plus rapides de la course de 20 km. En bas de la montagne, les derniers bénévoles hurlent leurs encouragements en voyant mon dossard du 40km. J’aperçoit Kevin au loin, venu m’encourager avant les 800 derniers mètres. Je retiens mes larmes. Je suis heureux du travail qu’il a livré, de son enthousiasme, de sa réussite dans mon plan de préparation. De la finesse de ses analyses.
Kevin m’accompagne jusqu’au tour du lac, Cathy est là et filme mon arrivée. Je pense à mon père décédé en mai, je passe la ligne d’arrivée et les amis sont là pour les félicitations. J’ai les genoux et les cuisses en compote mais je suis heureux.
Comment remercier mes amis de m’avoir relevé dans les épreuves difficiles de la vie connues en ce début d’année ? Ils m’ont lancé un défi, m’ont soutenu et encouragé. Je suis particulièrement content d’avoir été ainsi accompagné dans cette aventure.
Johann Graindorge boucle les 40 km en 5h25 à la 265e place. Cathy Suarez termine en 5h43 à la 338e place. Kevin Gathot en 400e en 6h08 pour son premier Trail à l’étranger. Je termine 500e en 7h41, avant dernier du classement. Dans la course de 20 km, Pierre Cornet améliore son chrono de 15 minutes et termine en 3h15 à la 401e place. Cette expérience entouré des amis était fabuleuse. J’aime ce genre d’aventure, l’impression de s’être dépassé, d’avoir surmonté une belle épreuve et, surtout, d’avoir construit un beau souvenir. On tentera de faire aussi bien à Madère en avril 2023 sur le Miut 42 km.

La tarte aux myrtilles
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